La Direction Générale du Travail (DGT) publie aujourd’hui les arrêtés représentativité patronale dans le secteur du bâtiment, choisissant de déterminer cette représentativité dans six périmètres et non pas sur les deux périmètres historiques sur lesquels la mesure a effectivement été réalisée au cours de l’année 2024. La CAPEB fait part de sa totale incompréhension face à ce procédé et aux chiffres qui en découlent, fortement contestables quant à leur conformité juridique, leur cohérence statistique et hautement préjudiciables pour les TPE du bâtiment qui constituent l’écrasante majorité des entreprises du secteur.
Une rupture injustifiée avec les périmètres historiques
Depuis 2016, la représentativité patronale dans le bâtiment a été systématiquement évaluée sur la base de deux périmètres économiques, reconnus et utilisés dans tous les arrêtés précédents :
Ces périmètres correspondent à une réalité économique clairement identifiée et validée tant par les partenaires sociaux que par plusieurs décisions de justice récentes, notamment du Conseil d’État du 6 février 2025. Ils ont permis, au fil des années, d’assurer une représentation équilibrée des différentes composantes du secteur.
Or, en complète rupture avec cette pratique installée et reconnue, la DGT entend désormais fonder sa mesure sur six périmètres, incluant quatre conventions collectives dites “catégorielles” (ouvriers +10, ouvriers -10, cadres, ETAM), en plus des deux périmètres historiques. Cette orientation constitue une rupture majeure avec la doctrine du Haut Conseil du Dialogue Social (HCDS) qui a toujours recommandé que les périmètres de mesure de la représentativité patronale soient, en toute logique, fondés sur l’activité des entreprises et non sur la catégorie de salariés couverte.
Une méthode de calcul pour le moins surprenante
Les chiffres avancés par l’administration pour ces nouveaux périmètres suscitent également l’incompréhension.
En effet, les données initialement transmises par les organisations professionnelles candidates, en l’occurrence la CAPEB et la FFB, ont été certifiées par des Commissaires aux Comptes et reposaient exclusivement sur les périmètres historiques conformément aux règles en vigueur à ce moment-là. Or, aucune procédure de contrôle équivalente n’a été appliquée pour les résultats extrapolés sur les périmètres catégoriels. Ainsi, certains résultats publiés font apparaître des chiffres strictement identiques pour les conventions cadres et ETAM, tant en nombre d’entreprises qu’en nombre de salariés, ce qui est statistiquement impossible.
Par ailleurs, les chiffres utilisés pour mesurer les effectifs sur les 4 périmètres catégoriels ont été obtenus en effectuant une simple addition sans distinction de catégories des chiffres globaux transmis par les organisations professionnelles. Ce procédé aboutit à dénombrer davantage d’effectifs dans les entreprises adhérentes des deux organisations qu’il n’en existe dans le secteur du bâtiment, jetant le discrédit sur leur véracité.
Une remise en cause du dialogue social équilibré
En s’écartant des périmètres historiquement reconnus, l’État fait le choix de marginaliser la voix des petites entreprises en ne leur reconnaissant pas la place qui est structurellement la leur, elles qui représentent pourtant plus de 96 % des entreprises du bâtiment, et de donner aux grandes entreprises le pouvoir de décider des règles sociales qui s’appliqueront aux TPE et à leurs salariés. Cette situation aboutira à une représentation déséquilibrée, inadaptée aux réalités du terrain, et contraire aux décisions de justice rendues sur ce sujet.
En conséquence, la CAPEB examine l’ensemble des voies de droit à sa disposition pour défendre la légitimité d’une représentation fondée sur les réalités économiques du secteur et sur des règles partagées et validées.
«La CAPEB est constamment guidée par le souci de simplifier la vie des entreprises artisanales du bâtiment au quotidien et s’est employée ces dernières années à négocier des accords paritaires en ce sens avec les organisations de salariés majoritaires. Consciente de l’importance de rassembler le plus grand nombre pour coconstruire le dialogue social dans le bâtiment, la CAPEB avait approuvé la proposition de la DGT visant à établir un champ dédié aux entreprises occupant jusqu’à 10 salariés afin de prendre en compte les spécificités de ces dernières, associé à un cadre de dispositions communes à toutes les entreprises du bâtiment. Une proposition rejetée par la FFB. En choisissant d’établir la représentativité des organisations patronales et salariés sur 6 périmètres au lieu de 2, l’Etat définit aujourd’hui un dispositif qui aboutira, à l’inverse, à complexifier considérablement le dialogue social dans le bâtiment et celui des entreprises. Cette situation sera, de toute évidence, défavorable aux entreprises artisanales du bâtiment et nous le déplorons fortement. » déclare Jean-Christophe Repon, Président de la CAPEB.